Le narguilé, ou la chicha, est une pipe à eau utilisée pour fumer du tabac. Le tabac peut être utilisé sous forme de tabamel, mélange comportant de la mélasse additionnée d’arômes, qui se consume avec du charbon. La fumée inhalée est comparable à celle de la cigarette et expose potentiellement les fumeurs aux effets du tabac sur la santé.
L’usage du narguilé est très répandu en Afrique du Nord et au Moyen-Orient.
Étymologie et synonymes
Le terme « narguilé » a pour origine le mot en persan نارگیل (nârgil) « noix de coco », lui-même inspiré du sanskrit. En effet, les premiers récipients utilisés pour cette variante de pipe à eau auraient été des noix de coco.
« Chicha » viendrait du mot persan شیشه (shisheh) « verre ». En Iran, cette variante de pipe à eau est appelée قلیان (ghelyân, ghalyân).
Nargil (persan : نارگیل), ghelyan, shisha, arguileh (arabe), houka (dans le monde indien, ce qui a donné hookah en anglais), ou encore chilam sont des synonymes.
Description
Le narguilé se compose de plusieurs parties : la cheminée, le bol supérieur, le corps (ou réservoir), la pipe immergée et le tuyau. Le narguilé peut également posséder un plateau situé entre la cheminée et le bol supérieur.
Le bol contient le mélange de tabac, de mélasse (glycérine végétale) pour conserver le tabac et d’essences de fruits parfois appelé tabamel et le charbon, qui est posé par-dessus. Certains mélanges ne contiennent pas de tabac et sont uniquement composés de mélasse et de pulpe de fruits2. Le bol se pose au sommet de la cheminée. Le corps du narguilé est rempli d’eau à moitié de sa hauteur, et de l’eau de rose ou d’autres additifs destinés à donner du goût peuvent être ajoutés. La pipe immergée est ensuite placée dans le réservoir, et reliée à la cheminée et au tuyau. La fumée du tabamel passe par l’eau qui refroidit la fumée mais ne la filtre pas (seuls 3% sont retenus dans l’eau, les 97% restants demeurent donc dans la fumée pour être inhalés3) avant d’atteindre la bouche du fumeur, qui aspire dans le tuyau prévu à cet effet. L’eau est changée régulièrement pour en retirer les résidus1.
Le tabamel utilisé dans les narguilés est spécialement conçu à cet effet : il a l’apparence d’une pâte humide, composé d’environ 30 % de tabac, qui est fermenté avec environ 70 % de mélasse, de miel et de la pulpe de différents fruits, qui sont destinés à donner à la fumée une saveur et un arôme fruite. On trouve des tabamels à tous les goûts : de la pomme à la cerise, de la menthe aux multifruits, et même le capuccino ou le cola5. Le tabamel est chauffé dans le fourneau à la température d’environ 450 °C.
Les réservoirs sont de formes diverses (en forme de noix de coco ou autres) et peuvent être ouvragés en métal, en cristal, en verre, en cuivre ou en poterie1. Certains sont rehaussés de dorures ou de parties argentées. Les parties métalliques du narguilé sont le plus souvent finement ciselées. Certains tuyaux sont également décorés. Enfin, le plateau du narguilé est lui aussi richement décoré (avec des perles, comme en Syrie) et ciselé. Les formes des narguilés sont très diverses et les décorations reflètent les influences décoratives de la région où ils sont fabriqués. Le mécanisme du narguilé permet d’envisager une utilisation simultanée du même appareil par plusieurs fumeurs, comme cela se voit parfois en dehors des sociétés où son usage est traditionnel et où l’instrument peut être au cœur d’une pratique sociale ancienne.
Histoire et usages
Origines
Les traces les plus anciennes de narguilé ont été trouvées en Afrique de l’Est. Des bols de narguilé ont ainsi été excavés en 1971 dans la grotte de Lalibela (Éthiopie). Leur datation semble indiquer une utilisation datant des années (avec une marge d’erreur de 80 ans). L’origine du narguilé continue toutefois à faire débat, d’autres chercheurs estimant que l’Inde pourrait être son pays de naissance.
L’émergence à plus grande échelle de l’utilisation du narguilé dans la société semble être simultanée à l’apparition des cafés publics et à l’arrivée du tabac au Moyen-Orient9. Les Portugais ayant introduit le tabac en Iran au début du xvie siècle, c’est au cours de la dynastie des Séfévides que son usage s’est fortement développé dans le pays, à tel point que la société persane tout entière l’utilisait à la fin du règne de Shah Abbas I.
La ghelyan est encore très populaire en Iran, et on peut la voir dans de nombreuses maisons de thé (chai khaneh), restaurants et autres espaces publics.
Les manufactures françaises comme Saint-Louis, Baccarat ou Christofle fabriquent des narguilés jusqu’en 1914. Ce produit d’apparat était alors fréquemment offert comme cadeau diplomatique.